CONTROVERSE(S)

 La lettre nîmoise du débat citoyen

Actualité

Notre raison d'être

Nos lettres

Nos enquêtes

Nous contacter

Liens utiles

Doit-on mobiliser de l’argent public pour aider les entreprises privées ?

L’Etat et les collectivités territoriales se vantent des budgets importants qu’ils dépensent pour aider les entreprises. Mais mobiliser de l’argent public pour subventionner des entreprises privées ne va pas de soi. Les bilans mitigés des dispositifs mis en place font régulièrement resurgir le débat sur les conditionnalités de ces aides. Au moment où l’argent public va se faire plus rare et les enjeux environnementaux et sociaux plus sensibles, la question mérite débat.

Pour :

Il est tout d’abord évident que lorsqu’une mesure règlementaire d’exception conduit à stopper l’activité d’une entreprise, celle-ci doit pouvoir bénéficier de compensation financière. Le COVID 19 en a donné une bonne illustration.

Ce peut être également le cas lorsqu’une nouvelle règlementation condamne certaines productions et invite les entreprises à une reconversion rapide de leur production. Des programmes d’appui aux filières d’avenir dans l’industrie, comme dans l’agriculture, servent cet objectif : création d’une filière de batteries, passage à l’agriculture bio dans les périmètres de protection des captages …

Contre :

Il est en effet légitime d’aider les entreprises à l’arrêt du fait de mesures générales appliquées à un territoire. Toutefois, cela doit rester l’exception.  Dans une économie de marché, une aide publique modifie les conditions d’une concurrence non faussée. Elle crée des effets d’aubaine sans que les impacts soient toujours durablement au rendez-vous. Elle favorise les entreprises bien introduites dans les réseaux politiques et administratifs aux dépens de celles qui sont peu habituées à monter des dossiers de demande aux formats exigeants.

Pour :

Les aides publiques accompagnent également la mutation des entreprises vers de meilleures performances environnementales. Elles contribuent ainsi à l’atteinte des objectifs fixés au niveau national et régional. Ces changements imposent des investissements en infrastructures, machines et process. Faute de capitaux ou résultats suffisants, de nombreuses entreprises, notamment les PME, ne seraient pas en mesure d’engager de tels investissements.

Contre :

Aider les entreprises à corriger leur bilan environnemental revient à donner une prime aux entreprises non vertueuses. Celles qui ont anticipé les évolutions attendues n’ont pas été aidées. Comment distinguer celles qui ont choisi délibérément de ne pas moderniser leur outil de travail pour mieux rémunérer leurs actionnaires et leurs dirigeants, de celles qui n’en avaient en effet pas les moyens ?

Pour :

Très souvent, l’aide aux entreprises vise avant tout à préserver ou favoriser l’emploi local. Coller aux choix de localisation d’une entreprise, favoriser la poursuite de l’activité d’une entreprise en difficulté, encourager l’extension d’activités existantes. Les élus sont en première ligne. Mesures fiscales, subventions d’investissement, mise à disposition de terrains ou de locaux, les manières d’agir sont variées. Bien entendu, souvent ces appuis s’accompagnent de la mise en place d’engagements  de l’entreprise, en particulier sur le maintien des emplois dans un délai donné.

Contre :

Certaines entreprises n’ont pas d’état d’âme, mais savent profiter des opportunités. Le « Règlement de l’aide à l’immobilier d'entreprise » adopté en septembre 2018 par Nîmes Métropole se montre très généreux à l’égard d’entreprises qui n’ont pas besoin de l’aide du contribuable. La SAS Maison Albar Imperator, nouveau propriétaire de l’Hôtel Impérator, a bénéficié d’une subvention de 75 000 € pour financer sept suites haut de gamme et leurs équipements. Les travaux sont estimés à 721 377,50 € HT (DE19-03-055). Aurait-elle créé ou maintenu moins d’emplois sans la subvention ? On peut en douter.

Une entreprise est souvent en difficulté du fait d’erreur de management : défaut d’anticipation des marchés, investissement absent ou inadapté, action commerciale défaillante, priorité donnée aux actionnaires … Peut-on aider une entreprise sans remettre en cause son management ? Comment s’assurer que les mêmes causes ne produisent pas les mêmes effets ?

Pour :

Les aides aux entreprises sont particulièrement bienvenues pour accompagner les jeunes pousses dont le projet est porteur de fortes valeurs sociales et environnementales. Ces entreprises ont souvent de faibles capitaux propres. Leurs capacités d’emprunt sont limitées. Les subventions et avances remboursables constituent de véritables tremplins pour ces pionnières des emplois de demain.

Contre :

Il existe de nombreux dispositifs d’appui aux jeunes entreprises : réseau Entreprendre, Business Angels, CJD, CCI, BIC Innov’up … Une collectivité publique ne peut être pertinente que si elle s’insère dans un dispositif plus large garantissant l’accompagnement dans tous les aspects de la fonction d’entrepreneur(euse). De plus les dispositifs conjuguent régulièrement les interventions de plusieurs acteurs publics (Région, Département, Agglomération, Etat, Europe). Il est indispensable que les critères d’attribution des aides soient coordonnés et rendus publics.

Sans conclure :

Effet d’aubaine ou besoin légitime et vital, le débat est loin d’être clos. Il est certain que les collectivités locales ne doivent pas se donner des objectifs de dépense, mais de résultats. Une bonne politique n’est pas celle qui dépense plus que son prédécesseur, mais celle qui dépense moins avec plus d’effets positifs. Gageons que l’évaluation des politiques votées va se développer à l’avenir avec une parfaite transparence pour les citoyens. Et vous, qu’en pensez-vous ?