CONTROVERSE(S)

 La lettre nîmoise du débat citoyen

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Peut-on sortir de la démocratie par délégation ?

La démocratie représentative, censée assurer le pouvoir par le peuple, montre aujourd’hui ses limites. L'abstention record traduit le désengagement des citoyens face à cette forme de démocratie réduite à un vote tous les 5 ou 6 ans Pour y mettre fin, s’est imposée dans le débat citoyen la notion de démocratie participative. Des expériences de budgets participatifs et de conventions citoyennes illustrent de nouvelles pistes.

Par ailleurs, la diversité sociale et politique n’est pas assurée par le système électoral en vigueur. Minorités politiques mal représentées à l’Assemblée nationale, présence ouvrière quasi nulle, étrangers non communautaires ignorés. Quartiers populaires souvent absents des conseils municipaux. Ce qui entraîne de la part des élus un éloignement du terrain et des réalités vécues. Et une défiance à l’égard du personnel politique.

Faut-il inverser la réalité actuelle ou imaginer un système mixte, où la délégation de pouvoir ne soit pas un abandon de l’intervention citoyenne ?

Pour :

Voter et contrôler l’exercice du mandat confié devraient aller de pair. Voire révoquer ce mandat s’il n’est pas accompli selon les engagements pris (une des mesures préconisées par la Commune de Paris il y a 150 ans).

Au niveau municipal ou intercommunal, l’exécution d’un programme majoritaire ne doit pas entraîner le monopole du pouvoir par la majorité en place. Le débat citoyen contradictoire doit se poursuivre pendant tout l’exercice d’un mandat et se confronter à des propositions alternatives.

Cela suppose au minimum la mise à disposition des citoyens de tous les dossiers, documents et moyens d’expertise avant la délibération. Chaque citoyen devrait être en mesure d’exprimer ses questions, ses craintes et ses propositions. Les réflexions des élus seraient ainsi enrichies par ces échanges permanents avec les citoyens.

Contre :

L’expérience de la Convention citoyenne organisée au niveau national nous montre les limites de la démocratie participative. Avant d’être en mesure de faire des propositions et d’en débattre, les citoyens tirés au sort ont reçu de la part de différents experts une formation sur les enjeux en présence. L’élaboration de politiques publiques ne s’improvise pas. Donner mandat revient à confier la responsabilité de se former et de décider à une personne dont on partage les objectifs et les valeurs.

Créer de la transparence sur les projets de délibération au niveau  local est une bonne chose. Mais il conviendrait de veiller que la participation effective engendrée ne soit pas accaparée par une minorité formée et disponible. Ce serait un non-sens démocratique.

Pour :

En parallèle du conseil municipal et du conseil communautaire, pourrait être mis en place une commission d'évaluation des politiques publiques (CEPP), chargée d’évaluer leur conformité avec les engagements pris, avec l’évolution des besoins de la population et analyser leurs effets réellement produits. Cette instance pourrait être saisie par des élus ou des groupes de citoyens pour conduire certaines démarches d'évaluation.

Contre :

L’évaluation des politiques publiques reste une belle idée qui n’a jamais réussi à s’imposer en France.

De quoi s'agit-il ? Etudier les effets positifs et négatifs des politiques mises en œuvre, afin de les ajuster et mettre à disposition de tous les citoyens les conclusions de ces évaluations. Une évaluation est pluraliste si elle associe les décideurs, les publics cibles et les organismes qui mettent en œuvre les politiques. L'évaluation est une manière de donner aux citoyens les moyens de contrôler l'action et les choix de leurs élus.

Dans la pratique les élus ne souhaitent rarement qu’une commission indépendante regarde si les belles intentions présentées dans les projets et les budgets obtiennent les effets attendus. Identifier également les effets pervers serait mal venu. Cela reviendrait à accepter de dire que l’on s’est trompé et qu’il faut changer de politique, en cas d’évaluation négative.

Pour :

On peut aussi imaginer que pour tous les projets dont le coût est supérieur à 5 M€, la CEPP puisse être chargée d'organiser une concertation préalable ouverte à tous, portant sur les problèmes posés, les besoins à satisfaire, les contraintes à prendre en compte, les impacts positifs et négatifs attendus, les solutions envisageables. Cette concertation devrait avoir lieu en amont des projets, avant que rien ne soit dessiné.

Contre :

La concertation préalable est en effet un bon outil pour redonner du pouvoir au citoyen. Elle indique clairement que l’on n’a pas signé un chèque en blanc aux élus. Mais les conditions de sa réussite supposent qu’elle devienne un réflexe positif pour les élus et non une obligation légale dont il faut se débarrasser par un service minimum.  Il conviendrait qu’une telle disposition relève d’un engagement des candidats aux élections, d’un véritable choix pour conduire des projets, et non d’une obligation.

 

Sans conclure :

Au moment où plusieurs partis politiques affirment la nécessité de rénover la Constitution de 1958, il apparait qu’il sera plus facile de mettre en place une démocratie participative au niveau local qu’au niveau national. Les processus d’expression directe à l’échelle nationale ne peuvent être que limités (référendum, conventions citoyennes …).

Par contre les pistes pourrefonder la démocratie locale sont plus prometteuses. Transparence, concertation, évaluation devraient être les principes du nouveau pacte des citoyens avec leurs élus. Ces nouvelles pratiques ne nécessitent pas de changement réglementaire mais au contraire un changement dans la manière dont les élus conçoivent leurs rôles de représentants des citoyens. Redonner toute leur place aux comités de quartier nîmois, sans en faire un relais ou un tremplin électoral, serait bienvenu. Gageons qu’à l’avenir les engagements sur la manière d’exercer un mandat seront présents dans le programmes des candidats aux élections.