CONTROVERSE(S)

 La lettre nîmoise du débat citoyen

Actualité

Notre raison d'être

Nos lettres

Nos enquêtes

Nous contacter

Liens utiles

 

Est-il judicieux de choisir un exploitant d’aéroport

pour gérer les monuments romains ?

 

Par une délégation de service public, la Ville de Nîmes vient de confier l’exploitation touristique et culturelle des monuments romains à la société Edeis Concessions, pour une durée de 3 ans. Edeis succède à la société Culturespaces, gestionnaire depuis 15 ans.

Pour :

Edeis veut « mettre les Nîmois au cœur de son projet », et propose de rendre la ville plus attractive. Il s’agit de répondre à la demande du maire, Jean-Paul Fournier, en créant « un nouveau spectacle dantesque centré sur la romanité au mois d'août » afin d'animer la ville durant plusieurs jours. Le programme municipal 2020 promettait « la création d’un nouvel événement sportif et culturel axé sur le patrimoine romain, avec la course Veni Vici (Nîmes, Pont du Gard, Uzès). » Reste la question du maintien des Grands jeux romains au mois de mai dont la marque appartient au gestionnaire précédent Culturespaces.

Contre :

Beaucoup de nos concitoyens s’interrogent : est-il légitime de confier à une société privée, que ce soit Culturespaces ou Edeis, la gestion du patrimoine architectural romain qui est un bien commun des nîmois comme de l’humanité ?

De plus, Edeis Concessions n’a aucune expérience en matière culturelle. Elle gère … 19 aéroports, un train touristique et un funiculaire. Va-t-elle pouvoir mettre en valeur et faire partager au plus grand nombre le patrimoine antique ? Les visiteurs ne seront-ils pas simplement des clients ?

 

Pour :

La société Edeis, spécialisée dans la gestion des ports et aéroports, entend associer la concession de l’aéroport de Nîmes-Garons à la gestion des monuments romains afin d’accroître la fréquentation de chacun d’eux.

Elle s’est engagée à innover, à investir et à maintenir les tarifs d’accès aux trois monuments (Arènes, Maison carrée, Tour Magne). Elle prévoit d’enrichir le contenu des visites. Elle programme une hausse du budget de communication et un nouveau spectacle d’été centré sur l’histoire romaine de Nîmes.

Contre :

Edeis n'a jamais fait de développement culturel à l’échelle d’un territoire historiquement marqué comme Nîmes. Sa vision est étroitement utilitariste et commerciale, les monuments romains constituant un simple produit d’appel touristique. Innover en matière culturelle et patrimoniale n’est-il pas un métier ? Enfin, pour décrocher la délégation de service public, Edeis n'a pas lésiné sur les moyens : projets et investissements supérieurs à ceux de Culturespaces. Notre patrimoine est devenu un enjeu dans l’univers impitoyable de la concurrence ultra-libérale.

Pour :

Edeis prévoit 1,8 M€ d’investissements sur trois ans. Spécialisée en ingénierie et en gestion d'infrastructures, elle compte mettre ses compétences au service de nos monuments, en créant de nouveaux équipements et d’autres contenus.  La société s'engage à « une fréquentation moyenne globale (monuments et spectacles) de 784 000 personnes/an, générant un chiffre d’affaires total en 3 ans de 18 M€ ». Son équilibre économique est bien entendu lié à cet objectif puisque sa rémunération ne dépend que de ses recettes, et non de subventions.

Contre :

Edeis affirme qu’elle veut fédérer tous les acteurs de la culture, les associations, le monde économique et les acteurs touristiques. Mais quelle sera la contribution réelle et possible des acteurs culturels dans les choix décisionnels ?

Edeis se retrouve en situation de monopole sur le territoire de l’agglomération, avec l’aéroport et les monuments romains. C’est un choix politique et idéologique. Les élus n’ont même pas imaginé valoriser le patrimoine en créant un service dédié bénéficiant de financements publics et/ou privés sous contrôle de la collectivité, comme cela existe au Pont-du-Gard. Au-delà des intentions, quels sont les liens avec la politique culturelle et touristique locale ? Nulle part il n’est fait mention de coopération avec le patrimoine antique d’Arles ou de Narbonne. L’expérience de l’échec d’une première candidature au patrimoine mondial de l’Unesco avec Culturespaces va-t-elle être rééditée pour la Maison carrée avec Edeis ?

Sans conclure :

Il manque au projet Edeis une vision globale du génie latin qui se retrouve à la fois dans les monuments, la littérature, l’histoire, la vie quotidienne. Ne pourrait-on pas imaginer un cheminement culturel valorisant l’ensemble, s’appuyant à la fois sur la sensibilisation des nouvelles générations et la mémoire collective des habitants ?